... Conte

 

Au cœur de la forêt

 ... Au cœur de la forêt des enfants s'amusent !

Tiens!
Ils ne sont pas comme les autres
ces enfants-là!
Ils ne marchent pas droit.
Leurs gestes sont saccadés, absurdes.
Et leurs mouvements se répètent
sans cesse.

Interminable sa tête décrit le même mouvement.
Inlassablement, Indéfiniment, Interminablement son corps,
devant cet arbre, se balance d'avant en arrière, d'arrière en avant.
Mécanique qui compte le temps qui passe.
Les bruits que distille ce tableau n'ont pas de sens pour mon oreille
trop habitée à des paroles, ciselées, raffinées et scandées.

Et debout devant l'arbre , ni il n'observe, ni il ne regarde, ni il joue.
Inlassablement, Indéfiniment, Interminablement,
son corps devant cet arbre, se balance d'avant en arrière, d'arrière en avant. Dans le mouvement perpétuel de métronome abandonné par son musicien.

Tout à coup tout bascule. Ce qui semblait donné,
inscrit et figé à tout jamais se dérègle. Les mouvements s'affolent, Les balbutiements deviennent des cris. Les souffles se raccourcissent
Alors que partout le tableau se fissure...
Inlassablement, Indéfiniment, Interminablement,
son corps devant cet arbre, se balance d'avant en arrière, d'arrière en avant.
Tandis qu'au sol un enfant est tombé.
Il crie gesticule arrache l'herbe.
sa tête frappe le sol et ses poings se crispent.
Dans un effort désespérer il essaie de se redresser,
Mais retombe lourdement sur le sol.
En un brouillard d'herbes mêlée de bave
et d'épines de sapins l'enfant se débat. Mais en vain.
Une petite fille s'approche de lui qui se calme.
son oeil brille...
Le silence est revenu le temps que ses bras top frêles
saisissent l'enfant au corps pour le relever.

Trop lourd! Il retombe.

Alors que la fille part en courant,
l'enfant à nouveau, se bat avec rage
mais impuissant devant cette force qui le terrasse.
Un homme qui semblait passer par là,
se pencha souriant à l'enfant qui fit la grimace.
"Relève-moi" dit l'enfant, "Aide-moi!"
Non Marc relève toi, tout seul, allez fait un effort!
Et l'homme se relève, reste là immobile et droit, souriant davantage.
Alors après un cri désespéré, le corps de l'enfant se raidit,
se soulève et retombe inanimé à terre.

Pas mieux qu'hier cette journée.
Sans rien dire, tout triste je me surpris à poursuivre ma route.
J'avais du m'arrêter longtemps
car derrière la forêt le soleil s'est couché.
Je décidais de rebrousser chemin.
Plus personne n'était là l'arbre était seul
et l'herbe arrachée gardait en elle son secret.
J'accélérai le pas, puis je ne sais pourquoi
Peut-être pour fuir ce lieu de souffrance
ou par peur, ou encore à cause du froid
je me disais que demain il faudrait reprendre le travail et que je ferai tout pour allonger la soirée devant la télé. Illusion, pour mieux repousser l'aube d'un matin nouveau.

Car ce n'est pas vrai que le matin
ça sent bon le pain et le café qui brûle;
car ce n'est pas vraie que l'aube est blanche!

Le doré du pain et 
la blondeur du  blé
et le brillant des grains de café
sont absorbés 
dans le gris de l'aube.

Des cris, des paroles
des bruits de branches mortes que des pas écrasent
me sortent de ma méditation.
Je venais, sans m'en rendre compte de rejoindre
ceux qui avaient leurs drôles d'aires de jeux
Et mes yeux ahuris me disaient
que l'enfant de tout à l'heure, le petit Marc,
sautait de joie et riait aux éclats.
dansait d'une danse syncopée et maladroite,
mais il dansait autour de l'homme qui le conduisait;
Il courait et s'élança de tout son corps
tordu et tourmenté
vers l'homme qui le reçut dans ses bras.
"Dis - lança Marc- tu y diras, hein, tu y diras que je me suis relevé tout seul!
"Bien sûr Marc,
tu vois je t'aiderai toujours comme çà!"

"" d'après un texte  Jean Ledu